pelloche

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mercredi 23 avril 2014

C'est (enfin!) arrivé près de chez nous


Une fois n'est pas coutume, je vais aujourd'hui vous parler un peu de films français. Je vois déjà vos mines dubitatives à l'idée de discuter de comédies lourdeaudes et de films intimistes (même si j'avoue apprécier souvent l'un et l'autre).

Grâce au festival Hallucinations Collectives déjà évoqué ce week-end, j'ai pu découvrir deux films de genre français, très étonnants, bien réalisés et qui méritent réellement le détour. Malheureusement, leur distribution en salle risque d'être semée d'embûches. Alors, il faut en parler, faire tourner, et on commence tout de suite.

Aux yeux des vivants, Julien Maury et Alexandre Bustillo


Après avoir réalisé A l'intérieur et Livide, le duo de réalisateurs arrive avec un projet petit budget / grandes ambitions.

On y suit trois collégiens un peu voyous, qui vont se retrouver au mauvais endroit, au mauvais moment et devoir tenter d'échapper à un étrange tueur.

Autant vous le dire tout de suite, il y a un sacré paquet d'incohérences, et c'est d'autant plus dommage que ce sont des incohérences scénaristiques qui auraient facilement pu être évitées, sans que ça coûte quoi que ce soit. Autre point faible, le jeu trop caricatural de certains acteurs (les adultes en particulier). Les incohérences étant nombreuses, elles méritent d'être soulignées: faux raccords, réactions parentales des plus étranges (je ne peux pas en dire plus, sinon je gâche le film, mais l'instinct paternel et maternel, de même que la logique n'ont pas grand-chose à voir là-dedans), objets arrivés de nulle part (mais où Béatrice Dalle cachait-elle son couteau?)...

Cela dit, finalement, tout ça, on s'en fiche un peu. D'abord, parce que les jeunes acteurs sont plutôt épatants. Tous les quatre (les trois garçons et la petite soeur) sont tout à fait crédibles, mention spéciale à Zaccharie Chasseriaud, dans le rôle de Tom, la grande gueule aux ailes brisées. Il est rare que les dialogues en français sonnent juste, surtout chez les jeunes acteurs et là, ça tombe pile, on dirait presque de l'impro. Pas une trace du syndrome du "Arrêtez vos salades, commissaire" quand ces gamins ouvrent la bouche.

Et le plus important est là: on flippe grave! D'abord parce qu'on a vraiment peur pour les gosses. Des petites frappes au grand coeur, des Tom Sawyer et Huckleberry Finn qui préfèrent courir la campagne et les studios de cinéma abandonnés que de se faire harceler par des profs sadiques à l'école. D'autant plus que leurs poursuivants, c'est vraiment pas des tendres: un famille de rednecks à la française, qui a morflé au retour de la guerre du papa militaire, et qui essaie de survivre en s'isolant du monde extérieur.


Les scènes de suspens sont bien maîtrisées et les scènes de tortures sont assez réalistes et donc bien immondes. La réalisation est ambitieuse et, dans l'ensemble, réussit son pari, épaulée par une photographie somptueuse, qui met bien en valeur une France rurale fantasmée, décor nostalgique et propice aux échappées belles des protagonistes.

Le film est également hyper référencé et ce, volontairement: il y a des références horrifiques évidentes, comme La colline a des yeux, mais aussi des références qui jouent avec notre nostalgie de jeunes spectateurs des années 80, des Goonies à ET en passant par Stand by me et qui font le véritable charme de ce film.

Donc, dans l'ensemble, un slasher à recommander pour son effet "tu-me-dis-quand-je-peux-ouvrir-les-yeux?" plutôt efficace et sa belle ambiance, si l'on veut bien être indulgent sur des maladresses parfois énormes.


Goal of the dead, Benjamin Rocher et Thierry Poirot


Alors là, je vous préviens: gros coup de coeur! Au sens propre: un coeur encore battant jeté d'un coup de pied en pleine lucarne!

Pourtant, j'aime pas le foot. Pourtant, je me méfie des comédies horrifiques, en particulier de zombies, parce que je pense que depuis Shaun of the Dead, on fera jamais mieux. Pourtant, en bonne provinciale, j'aime pas trop que les Parisiens viennent se moquer de nous. Bref, on était sur un terrain glissant...

Mais là, j'ai succombé. Je crois même que je suis un peu amoureuse de ce film. On a passé une si belle soirée ensemble, et il m'a fait tellement rire! J'ai qu'une envie, c'est de le revoir, et de le présenter à mes amis et à toute ma famille!

Que je vous explique un peu d'abord, c'est pas un mais deux films. Et non, c'est vraiment pas trop. Deux films, parce que deux réalisateurs, Benjamin Rocher de La Horde pour la première partie, et Thierry Poirot, d'Atomik Circus, pour la deuxième. Un bon vieux double feature, donc, pour passer une soirée d'enfer.

Le circuit de distribution est assez particulier: pas de sortie en salles nationale, mais des soirées, d'abord à Paris, puis en province pour présenter le film, avant une sortie en DVD prévue en juin 2014. Du coup, pas facile de le voir en salle, mais si vous le pouvez, ambiance garantie! Même si à la maison, avec de la bière et de la pizza, c'est aussi parfait.

Donc, comme son nom l'indique, Goal of the dead est une comédie horrifique et footballistique. L'Olympique de Paris s'est fourvoyée et se retrouve en énième division. L'équipe va devoir se rendre à Capelongue, une toute petite ville du Nord, pour affronter l'équipe locale. C'est aussi l'occasion pour Samuel Lorit, ancienne gloire sur le retour de retrouver sa ville natale et de se rendre compte que cette dernière a gardé une certaine rancune contre lui.

Et puis bon, y'a des zombies!

Avant tout, si j'aime ce film, c'est parce qu'il est magnifiquement écrit, et je pèse mes mots. Ca faisait très très longtemps que je n'avais pas vu une comédie française aussi bien écrite: pas de temps mort, pas d'incohérences, une véritable économie du scénario (chacune des scènes sert à quelque chose), et des dialogues drôles ET crédibles ( je savais même pas qu'on savait faire ça en France!). Vous me direz "En même temps, y'a une équipe de six scénaristes, heureusement que c'est bien écrit". Et ben vous savez quoi? Si il faut mettre plus de blé dans des équipes de scénaristes que dans des salaires d'acteurs ou des budgets de com pour sauver le cinéma français de la médiocrité, moi je vote pour!

Du coup, comme le scénario est impeccable, y'a pas de secret, tout suit.

Le jeu des acteurs: Alban Lenoir est parfait en footballeur bourru un peu teubé sur les bords, Typhaine Daviot est extraordinaire de justesse et de spontanéité, Ahmed Sylla joue terriblement bien la tête à claque (mention spéciale à sa petite danse du "j'attire le zombie", un sommet de comédie!), et Benoit Moret, dans le rôle du mec en mal de reconnaissance, est juste parfait. Mais quand les personnages sont bien écrits, c'est du pain béni pour les acteurs et là, le moindre second rôle a une véritable consistance.

Ensuite, le rythme. Comme c'est bien écrit, tout s'enchaîne à la perfection et on ne voit pas passer les plus de 2h20 de film(s). On ne s'ennuie pas une seconde.

Ensuite, la réalisation fonctionne parfaitement, aussi bien dans la première partie qui reste au plus près des personnages et permet une exposition idéale, que dans la deuxième qui rentre vraiment dans le survival. Ma préférence va quand même à la deuxième, ne serait-ce que pour la scène sur le stade entre Ahmed Sylla et Alban Lenoir, qui est absolument virtuose, je vous jure, c'est la première fois que je trouve que le foot, c'est beau!


Pour moi, ce double film montre qu'enfin, ça y est, on y est arrivé! On peut faire des comédies de genre à l'égal des Anglais. Pas besoin de moyens mirobolants, de comiques surtaxés, de gags vus mille fois! Elle est là la comédie française de l'année, et je n'ai pas peur de le dire, de la comédie de l'année tout court!

Parce qu'on a ici tout pour que ça marche: on essaie pas de faire comme les ricains en moins bien, et on se vautre pas non plus dans la franchouillardise absolue, intraduisible ailleurs. Ici, comme Shaun of the dead l'a fait il y a quelques années en Angleterre, on prend un sujet qui fait vibrer la nation, des personnages comme vous et moi, et on n'a pas peur de faire un film avec tout ça, on n'a pas honte et en se recentrant sur nos spécificités, on fait un vrai film universel!

Et si ça, c'est pas un renouveau du film français, ben je sais pas ce que c'est!










4 commentaires:

  1. oh là, les incohérences de scénario si c'était si facile que cela de les enlever, il y en aurait beaucoup moins que cela alors-et pas uniquement dans le cinoche francais car moi aussi je suis un grand défenseur :o).. moi c'est vrai que je suis du genre à bloquer à la moindre petite incohérence de scénar qq soit le genre de films..

    .goal of the dead on m'en parle souvent depuis pas mal de temps j'aurais pu le voir à quelques reprises, mais moi c'est pas le foot qui est l'objet de mes réticences- j'adore les films sur le foot meme si on en voit peu de bons - mais les zombies, c'est pas du tout mon truc...et c'est en partie pour ca que j'ai zappé ce festival, c'est pas trop ma came ce genre de cinoche mais heureusement que ce festival existe pour ceux qui aiment ca!! bonne soirée à toi!

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  2. Concernant les incohérences de scénario, la difficulté, c'est qu'il faut s'en rendre compte dès l'écriture. C'est pourquoi j'insiste pas mal sur l'écriture de Goal of the dead. je trouve que notre culture de l'auteur fait parfois qu'on sous-estime le fait d'y travailler en équipe, alors que ça peut parfois aider à le rendre plus efficace, en particulier sur le film de genre. Mais bon, ça reste un long débat, et j'y consacrerai peut-être un article un de ces 4.
    Sinon, je peux comprendre que certaines personnes apprécient moyennement le film d'horreur, mais pour Goal of the dead, je pense que tu peux faire une exception, ne serait-ce que pour voir une très bonne comédie. Bonne soirée à toi aussi!

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  3. Tout a fait d'accord en ce qui concerne Goal of the dead. Le foot je déteste mais pas les zombies. Et quelle écriture ! J'ai vraiment aimé cette cohérence dans le comportement des zombies. Lorsqu'ils gardent un peu de leur mémoire, notamment la groupie et évidemment le match final. Plus encore ce moment où le coach, le joueur et le recruteur sont coincés dans les vestiaires et s'imagine qu'à l'extérieur se déroule une manifestation de supporters en colère. Malgré tout le barouf qu'ils produisent , la rage qu'ils y mettent leur paraissent normal et mine de rien je trouve ça fort.
    Chaque acteur est à sa place. On a une bonne dose de gore et un sujet vraiment traité par une explication simple au début. Sans oublier la réalisation dont le 1er match entre 'vivants' est surprenante.
    Effectivement j'ai d'abord pensé à La Horde. J'ai trouvé les critiques particulièrement injustes à son encontre d'ailleurs quand tout les ingrédients du genre étaient présents et maîtrisés. La France est souvent considérées comme mauvaise élève quand il s'agit de science fiction pourtant sur ce sujet ils font preuve d'une maturité plus évidente que certains programmes US.

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    1. C'est vrai qu'il y en a un peu marre d'entendre "la France est nulle pour les films d'horreur/de SF/ fantastiques" si à chaque fois qu'une équipe fait des efforts pour sortir un film d'excellente facture, on leur met des bâtons dans les roues à la distribution. Mais bon, pas d'auteur renommé, pas d'acteur bankable, faut croire que la qualité scénaristique et cinématographique ne suffit pas. C'est vraiment dommage pour ce film qui est pour moi un vrai bijou, une vraie grande comédie qui soigne des "Qu'Est-ce que j'ai fait au bon dieu" et consorts...

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